Un SALADIN restauré en Grande-Bretagne.
La version automitrailleuse, le Saladin, n’était pas sans rappeler son aînée la Ford M-8, mais avec les ponts équidistants cette fois, et quatre roues directrices sur six.
le STALWART sur la même base 6×6 était un camion amphibie.
Un Stalwart en pleine action.
Sur ce Stalwart en restauration chez un spécialiste anglais, on peut étudier les technologies originales de cet engin des années cinquante.
Sitôt l’après guerre, l’armée anglaise pensa à moderniser son parc roulant avec du matériel typiquement insulaire, comme il se doit (une tendance qui s’amenuise de nos jours puisqu’on voit des soldats de la reine dans des Pinzgauer ou des ACMAT !. Comme il s’agissait de blindés, les spécialistes se tournèrent vers la marque ALVIS (qui a commis aussi quelques belles voitures civiles, précisons-le).
Ainsi, en 1952, naquit le FV – 603 « SARACEN » pour remplacer les transports de troupe semi-chenillés, totalement dépassés de par leur casemate ouverte : il s’agissait de confectionner une « boite à soldats » blindée , fermée de partout et susceptible d’une grande mobilité. Comme on préféra les roues aux chenilles, il restait la solution d’en mettre un peu plus. Du coup, le Saracen se retrouva avec six grosses roues motrices, dont quatre directrices à l’avant (les trois essieux étaient équidistants). Mu par un moteur Rolls-Royce B80 (8 cylindres essence, 160 hp), le Saracen emportait, outre chauffeur et chef de bord, 10 militaires équipés, tout le monde entrant (ou sortant) par la seule porte arrière.
Le chauffeur, positionné au centre, devait maîtriser un engin de 8.5 tonnes à vide parvenant à 70 km/h par le biais de cette fameuse boite présélective Wilson qui équipa quelques voitures françaises, dont les fameuses Talbot-Lago Record 26 chevaux fiscaux : elles encaissaient bien la puissance ! Utiliser ce type de boite à cinq vitesses demandait d’être attentif : il fallait positionner à l’avance , au volant, le levier de commande sur la prochaine vitesse à passer (donc deviner, en ville, si l’on allait accélérer ou rétrograder…) et sur un simple coup de pédale de gauche, la vitesse passait très vite, libérant les mains, dans un virage par exemple. Mais en cas de mauvais positionnement, la boite Wilson punissait l’opérateur en lui renvoyant puissamment la jambe gauche en l’air ! L’engin était en outre doté d’une boite de transfert avant-arrière et de différentiels intermédiaires.
Cela n’empêcha pas le Saracen d’être vendu à l’exportation dans une soixantaine de pays, du Commonwealth ou d’ailleurs, pour un total de 1838 exemplaires avant d’être remplacé en 1963 par le FV-432, un retour aux chenilles avec ce clone du M-113 américain. On trouve aisément ce matériel chez les spécialistes anglais, à un prix raisonnable.
Alvis profita du succès de cette technologie des fifties pour extrapoler deux autre engins guerriers. En premier lieu une auto-mitrailleuse baptisée FV-601 « Saladin » sur la même plate-forme 6×6 mais avec cette fois le moteur à l’arrière et des freins assistés pour stopper 12 tonnes. La tourelle était dotée d’un canon de 76 mm, et la (faible) production cessa en 1972.
Et puis en second lieu un curieux camion amphibie appelé FV – 620 « Stalwart », équipé d’un moteur un peu plus puissant, un Rolls de 220 hp, mais plus gourmand (70 litres d’essence au cent km, contre 50 pour le Saracen). Il fallait remuer 10 tonnes de poids mort et une charge possible de 5 tonnes, et l’engin était même légèrement hors gabarit avec 2.60 m de large.
L’animal n’était pas rapide (63 km/h) et, sur l’eau où il se déplaçait mollement par hydrojets, il craignait les vagues lorsqu’il était en charge. La technologie commune de la série Alvis 6×6 était intéressante avec ses suspensions à barre de torsion longitudinales, ses 24 amortisseurs, ses freins à disque, sa transmission de type « H » (arbres multiples) et ses roues indépendantes. Cet hippopotame fut construit à 1600 exemplaires seulement jusqu’en 1972.
On notera que l’armée française dans les années soixante, en expérimenta timidement quelques uns, rebaptisés pour la circonstance « Auroch » et cachés pudiquement derrière le sigle Berliet !